Les
Ailes du Désir
L'acteur
hollywoodien Peter Falk arrive dans le Berlin-Ouest d'avant la chute du mur
pour jouer dans un film reconstituant la chute de la capitale nazie, en 1945.
Il erre dans la ville sur la trace des souvenirs de sa feue grand-mère, juive.
Les passants ne sont pas sûrs de reconnaitre l'inspecteur Columbo. Damiel et
Cassiel, deux anges invisibles, errent de leur côté à l'écoute des voix
intérieures des habitants, âmes mortes enfermées dans leur quotidien et ses
soucis, que ce soit la vieillesse, l'enfance, l'infirmité, le deuil,
l'accouchement, le déménagement, le divorce. Depuis les cieux au dessus de
Berlin, ces esprits messagers documentent les désirs et angoisses secrètes des
humains afin de témoigner de tout ce qui chez eux relève d'une démarche
artistique et traduit une recherche de sens et de beauté. Présents depuis
toujours, ils ont assisté, comme des enfants découvrant le monde, au début de
la lumière, à la fin d'une ère glaciaire, à la formation des rivières, à
l'apparition des animaux. Quand un premier homme est apparu, ils ont découvert
avec lui le rire, la parole, la guerre, l'histoire.
Les Ailes du Désir
Réalisation : Wim
Wenders
Scénario : Peter
Handke, Richard Reitinger, Wim Wenders
Musique : Jürgen
Knieper, Laurent Petitgand, Nick Cave and the Bad Seeds
Production : Argos
Films, Road Movies Filmproduktion, West Deutscher Rundfunk,
Genre : Merveilleux,
Drame, Romance
Titre
en vo : Der Himmel über Berlin
Pays
d'origine : Allemagne de l’Ouest, France
Langue
d'origine : allemand, français
Date
de sortie : 23 septembre 1987
Durée : 128
mn
Casting :
Bruno
Ganz : Damiel
Solveig
Dommartin : Marion
Otto
Sander : Cassiel
Curt
Bois : Homer, le vieux poète
Peter
Falk : lui-même
Nick
Cave : lui-même
Blixa
Bargeld : lui-même
Mick
Harvey : lui-même
Kid
Congo Powers : lui-même
Thomas
Wydler : lui-même
Rowland
S. Howard : lui-même
Jürgen
Heinrich : l’homme
récupérant l'appartement de sa mère défunte
Hans-Martin
Stier : le mourant
Sigurd
Rachman : le suicidé
Laurent
Petitgand : le chef
d'orchestre
Chick
Ortega : le batteur
Lajos
Kovacs : l'entraîneur de Marion
Elmar
Wilms : un homme triste
Didier
Flamand : l'ange de la bibliothèque
Béatrice
Manowski : la jeune
prostituée
Bruno
Rosaz : un clown
Annelinde
Gerstl : femme sur l'autoroute
Mon
avis : Je ne vais pas vous mentir, si je
me suis plonger, pour la toute première fois, dans le visionnage de ce
véritable monument du Septième Art qu’est Les
Ailes du Désir, c’est, principalement, en raison de la présence, dans ce
film, d’un certain Nick Cave, toujours accompagné de ses fidèles Bad Seeds –
ce, dans la version années 80 du groupe, c’est-à-dire, avec Blixa Bargeld, Mick
Harvey et compagnie. Bien entendu, étant un fan absolu de l’australien et de ses
comparses, ma curiosité était éveillée depuis longtemps, surtout que, à coté de
cela, j’avais entendu tellement de bien du long métrage du sieur Wim Wenders
que j’étais convaincu que je ne pouvais pas passer à coté de ce film. Pourtant,
parfois, lorsque l’on attend beaucoup d’une œuvre, on finit par être déçu…
Alors, est-ce que ce fut le cas avec Les
Ailes du Désir ? Ma foi, il est inutile de tourner autour du pot plus
longtemps, pas le moins du monde ! Il faut dire que, avec Les Ailes du Désir, Wim Wenders a signé
son film le plus ambitieux, le plus riche et, pour tout dire, le plus réussi où
il y campe une Allemagne d'avant la réunification, symbolisée par la ville de
Berlin, et que l'on découvre blessée par la guerre, marquée par la mauvaise
conscience du passé nazi, mais aussi par la misère sociale, et tentée par le
désespoir. Les Anges, en particulier Damiel et Cassiel dont le réalisateur nous
montre les pérégrinations, tentent d'y insuffler l'espoir et l'amour. Damiel,
interprété par un Bruno Ganz en état de grâce, tombé amoureux d'une trapéziste,
renoncera finalement à sa nature purement spirituelle pour assumer la condition
charnelle des hommes et partager concrètement leur sort. Indéniablement, Les Ailes du Désir est à la fois très
complexe, profondément humain et intensément poétique et on peut y percevoir
plusieurs niveaux de lecture… Au niveau le plus immédiat, on y verra une
méditation sur le destin de l'Allemagne, voire un plaidoyer pour la
réunification allemande. Mais, plus profondément, on y lira une fable
philosophique en forme de méditation sur la condition humaine et sur ce qu’est
vraiment la vie – les Anges, eux, créatures spirituelles, n’étant que des
témoins passifs qui, a priori, ne ressentent rien... Mêlant le noir et blanc – le
monde vu part les anges – et la couleur – le monde vu par les humains – le
réalisateur fait montre d'une grande audace formelle dans la construction, dans
l'usage de textes poétiques et dans le recours à des musiques très diversifiées
usant parfois d'un langage avant-gardiste... De même, il y a cette construction
narrative qui peut surprendre puisque, la plupart du temps, nous nous
contentons de suivre les pérégrinations des deux Anges qui écoutent les pensées
des humains, ce qui a put en déstabiliser plus d’un, mais qui finit, au bout d’un
moment, par être accepter par le spectateur qui devient, lui aussi, témoin
passif de ce qui se déroule à l’écran. Ajoutons à cela un Peter Falk qui joue
son propre rôle et, donc, Nick Cave et ses comparses qui ont une apparition
marquée et l’on obtient, au final, une œuvre pour le moins singulière,
originale, terriblement poétique et tout simplement inoubliable… Bref, vous l’avez
compris, à mes yeux, Les Ailes du Désir
constitue donc un chef-d’œuvre qu'aucun cinéphile ne peut ignorer et même s’il
m’aura fallut bien longtemps pour, enfin, découvrir cette merveille, je n’ai
nullement été déçu par ce formidable voyage proposé par un Wim Wenders inspiré
comme jamais…
Points
Positifs :
-
Probablement un des films les plus singuliers qu’il m’ait été donné de voir :
terriblement imaginatif, bourré d’idées pour le moins audacieuses, emprunt d’une
poésie certaine et amenant le spectateur à de profondes réflexions, Les Ailes du Désir est, sans aucun doute
possible, un des plus grands films des années 80 et, dans un sens plus large,
un véritable chef d’œuvre du Septième Art !
-
Une œuvre qui insiste lourdement sur le sens de la vie, sur ce qu’est l’humanité
mais aussi, sur ce qu’est vivre, c’est-à-dire, éprouver des sentiments, aimer,
souffrir, apprécier les bonnes choses voir les petites choses du quotidien.
Bref, tout le contraire de ce que sont les Anges qui ne sont que des êtres
spirituels passifs…
-
Une réflexion sur le sort de l’Allemagne de l’après-guerre et sur le désir de
réunification – nous sommes a la fin de la Guerre Froide et Berlin est divisé
en deux par le fameux Mur.
-
Tournée en partie en noir et blanc et en partie en couleur, ce choix audacieux
se révèle dans la dernière partie du film et, ma foi, force est de constater
que l’idée est plutôt pertinente.
-
Un casting que l’on peut qualifier d’excellent et si Bruno Ganz occupe naturellement
le devant de la scène, force est de constater que Peter Falk et Otto Sander
livrent de fort belles prestations, quand à Solveig Dommartin, ce fut une belle
découverte pour ma part !
-
Photographie, décors, emploi d’images d’archives, plans audacieux, bande
originale… ma foi, on frôle la perfection.
-
Le plaisir pour les fans de Nick Cave and the Bad Seeds de les retrouver ici,
surtout qu’ils interprètent deux titres : The Carny et From Her to
Eternity.
Points
Négatifs :
-
A moins d’être totalement allergique au cinéma expérimental, de ne pas
supporter les films qui sortent des sentiers battus ou qui, emprunts de
poésies, amènent à la réflexion, je ne vois pas ce que l’on peut ne pas aimer
dans Les Ailes du Désir. Mais bon,
que nous avons affaire à une œuvre qui ne plaira pas à tout le monde, c’est un
fait…
Ma
note : 9/10