Les Seigneurs de Bagdad
Les
Seigneurs de Bagdad
Zill
le mâle dominant, Safa la femelle résignée, Noor l'insoumise qui rêve
d'insurrection et son lionceau Ali vivent dans le zoo de Bagdad une vie rythmée
par l'arrivée de viande fraîche jetée dans leur fosse par les gardiens. Un
jour, deux gardiens envoient un énorme âne mort dans l'enclos des lions, et ils
s'enfuient aussitôt, sous les premières bombes larguées par les chasseurs
américains. En effet, l'explosion projette les lions contre un mur de l'enclos
et détruit littéralement la paroi de béton qui sépare les fauves du monde
extérieur. « Est-ce qu'on est morts ? » demande le jeune Ali.
« Non, on est libres » répond Zill. Commence alors la
traversée de Bagdad par cette tribu de lions affamés, partagés entre
l'inquiétude du confort perdu, et la découverte d'une liberté qu'ils
n'espéraient plus…
Les Seigneurs de
Bagdad
Scénario
: Brian K. Vaughan
Dessins
: Niko Henrichon
Encrage : Niko
Henrichon
Couleurs : Niko
Henrichon
Couverture : Niko
Henrichon
Genre : Graphic
Novel
Editeur : Vertigo
Titre
en vo : Pride of Baghdad
Pays
d’origine : Etats-Unis
Parution
: 02
janvier 2008
Langue
d’origine : anglais
Editeur
français : Urban Comics
Date
de parution : 21 mars 2012
Nombre
de pages : 144
Liste
des épisodes
Pride
of Baghdad
Mon
avis : Tout d’abord, avant de plonger
dans ce bel album, il serait bon pour le lecteur de savoir que l’intrigue de
ce Pride of Baghdad est tirée d’une histoire vraie. En effet,
dans les premiers jours de la guerre, en mars 2003, quatre lions prirent
effectivement la fuite du zoo de la capitale irakienne avant d’être abattus par
des soldats américains, victimes parmi tant d’autres de ce conflit qui fit (et
fait encore) couler tellement d’encre. De ce fait divers pour le moins
insolite, le scénariste, Brian K. Vaughan, s’est inspiré pour nous proposer un
magnifique et triste récit où l’on suit donc ces quatre lions, Zill le mâle
dominant, Safa la vieille désabusée, Ali le jeune fougueux et Noor la jeune
mère férue de grands espaces, en quête de liberté au beau milieu des ruines de
Bagdad. Décors apocalyptiques de circonstances, couleurs où prédominent le
jaune/orange du désert et le rouge du sang et des flammes, bâtiments en ruine,
cadavres divers, le tout nous entraîne, en compagnie des quatre lions, dans une
ambiance assez pesante, rehausser par les dessins de qualité d’un Niko
Henrichon diablement bien inspiré et qui apporte énormément, de part son
application et son talent, a la qualité de l’œuvre. Mais si du coté des
graphismes, il n’y a rien à dire (sauf du positif), c’est bel et bien
l’histoire qui emporte l’adhésion du lecteur : voici une réflexion sur la
liberté (terme tant de fois vanté et utilisé lors de ce conflit si
controversé), sur les dégâts collatéraux (terme cynique s’il en est) et sur la
brutalité de l’homme. Car il est évident que ces lions, si attachants et aux
personnalités bien marquées, en vadrouille dans la belle ville de Bagdad n’ont
aucune chance de recouvrer un jour une liberté autre que temporaire. Les hommes
n’aiment pas voir la nature à l’état sauvage gambader dans ses rues, surtout
s’ils sont armés et se déplacent en tanks. La fin, prévisible et dramatique,
devient alors inéluctable, prouvant une fois encore la mainmise de l’homme sur
son environnement, qui confine à la tyrannie. Le principal défaut que certains
pourraient reprocher à cette histoire serait l’humanisation de certains animaux
ou de leurs actes. Mais cette fameuse humanisation, justement, offre en même temps
une résonance particulière sur ce conflit, avec la réflexion suivante : la
liberté s’acquiert-elle, ou peut-elle être offerte (comme les Américains ont
voulu offrir la liberté au peuple irakien, en le libérant du joug de Saddam
Hussein) ? Cruelle, mais nécessaire, cette évocation originale d’un conflit
controversé offre un point de vue décalé à des créatures qui subissent les
décisions des humains. En captivité comme en liberté… L’on pourrait croire que,
a première vu, ce Pride of Baghdad, de part ses protagonistes
animaliers, aurait été plu léger, or, il n’en est rien et cette œuvre, qui
mérite véritablement que l’on s’y attarde, se révèle d’une grande profondeur et
soulève bien des questions sur les comportements humains, ainsi que sur une
guerre qui, six ans après son déclanchement, cause toujours bien des ravages et
des souffrances. Là repose la grande force des auteurs de Pride of
Baghdad, nous montrer par le biais d’animaux en quête de liberté tout le
drame et l’hypocrisie de ce conflit. A découvrir absolument.
Points
Positifs :
- Davantage
qu’une simple bande dessinée, ce Pride of Baghdad est une
œuvre philosophique, une ode a la liberté mais aussi un pamphlet a l’encontre
de la cruauté de la guerre et de l’hypocrisie qui l’accompagne, le contexte
étant, naturellement, renforcé par ce conflit irakien où, sous couvert de
libérer l’Irak de Saddam Hussein, les USA de Bush s’en sont aller chercher du
pétrole et causer des centaines de milliers de morts.
-
En mettant en scène des animaux qui ne rêvent que de liberté et qui sont
complètement ballotés par les événements et la folie des hommes – qui,
accessoirement, leur est incompréhensible – Brian K. Vaughan réussit a nous
toucher de fort belle manière, avec une histoire triste et universelle.
-
Saluons comme il se doit les dessins de Niko Henrichon qui brille
particulièrement pour deux raisons : certaines grandes planches et, bien
entendu, la colorisation, somptueuse.
-
Une couverture magnifique !
Points
Négatifs :
-
Si Niko Henrichon est un bel artiste, on notera qu’il a un peu de mal sur les
scènes d’actions en certaines occasions. Oh, rien de catastrophique, rassurez
vous, mais bon…
-
Dommage que les éditions Urban aient changé le titre original
pour Les Seigneurs de Bagdad. Cela ne se justifiait pas forcément,
surtout pour une œuvre déjà parue chez nous il y a quelques années.
Ma
note : 8/10
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