Mustang
Cinq sœurs orphelines sont élevées par leur grand-mère dans un village du nord de la Turquie, à 1000 km d'Istanbul. Le dernier jour de l'année scolaire, elles rentrent chez elles par le bord de mer, en compagnie de camarades de classe. Juchées sur les épaules des garçons, elles s'affrontent pour se faire tomber à l'eau tout habillées. Les ragots du village les précèdent chez elles. Leur jeu innocent a été jugé obscène. L'oncle Erol — sombre brute très à cheval sur un patriarcat qui se drape de tradition, de morale et de religion — reproche à la grand-mère une éducation trop laxiste. Les aînées doivent subir à l'hôpital un examen d'intégrité hyménéale. Et la maison se transforme peu à peu en prison : murs d'enceinte rehaussés, portes fermées à clef, barreaux aux fenêtres, plus d'école, plus d'ordinateur, plus de téléphone, mais des cours de cuisine et de ménage dispensés par des femmes à hijab.
Mustang
Réalisation : Deniz Gamze Ergüven
Casting :
Güneş Nezihe Şensoy : Lale, la benjamine, 11 ans environ
Mon avis : J’ai eu l’occasion, au fil des ans, de voir quelques films turcs et si ces derniers brillent particulièrement par leur absence sur ce blog, c’est un peu par hasard, cependant, dans le cas présent, c’est-à-dire, Mustang, disons que nous abordons probablement l’œuvre qui m’a le plus enthousiasmer venue de l’ex-Empire Ottoman… Ainsi, si ce film est une coproduction germano/franco/turque – la réalisatrice, Deniz Gamze Ergüven, vivant dans l’Hexagone – cependant, ne nous y trompons pas : Mustang est avant toute chose un film turc, réaliser par une turque, avec des acteurs turcs et traitant de problématiques turques… et, justement, pas la moindre puisque celle-ci est la condition féminine dans ce magnifique pays, condition peu enviable, comme on peut s’en douter surtout depuis la prise de pouvoir de ce triste sir d’Erdoğan et de son parti d’ultrareligieux il y a de cela quelques années. Bien entendu, l’intrigue de Mustang ne se déroule pas a Istanbul mais dans un petit village paumé où le patriarcat est le plus fort : sous couvert de religion et de bonnes mœurs, cinq adolescentes vont vivre ce qu’il faut bien appeler un enfer, emprisonnées par leur famille et, assez rapidement, contraintes a des mariages forcés tandis que, de sa tour d’ivoire, règne en maitre ce triste individu qu’est leur oncle, patriarche moustachu insensible a leur sort et ne se souciant, accessoirement, que de sa réputation a lui et de son plaisir – les bonnes mœurs, c’est bien pour l’image de marque, l’inceste, c’est bien pour son plaisir. Alors bien sur, j’ai put voir ici et la que certains auront trouvé a redire quand au propos du film, celui-ci, selon eux, caricaturant de belle manière, une fois de plus, la société musulmane et, dans le cas présent, la Turquie. Pourtant, ces mêmes personnes qui seront prêt a lever hurler au loup pour des causes moins nobles ont tort dans le cas présent : oui, la condition féminine n’est pas terrible dans bien des pays musulmans et oui, celle-ci était meilleure dans la Turquie d’avant Erdoğan. Le nier serait une ineptie, voir, pire, contribuer a ce quelle se pérennise. Mais bon, peu importe car ce qui compte avant toute chose, c’est le film en lui-même et de savoir si celui-ci est bon ; après tout, contester, c’est bien, mais si l’œuvre est bonne, c’est mieux. Et, ma foi, force est de constater que Mustang est diablement bien ficeler ; oh, certes, ce n’est pas un grand film, un incontournable qui marque les esprits et que l’on pourrait voir, encore et encore, cependant, ne serais-ce que pour ses cinq et très jeunes actrices qui, quasiment, portent a elles seules le film, Mustang vaut le coup. Touchantes, parfois drôles, souvent dramatiques, les jeunes filles éblouissent de fort belle manière ce long métrage au propos dur, très dur même par moments, tentant, tout simplement, de vivre et d’être heureuses dans une société où l’homme est roi et où la femme, forcément, une véritable bonniche. Bref, vous l’avez compris, un film attachant, triste et joyeux à la fois, mais qui, ma foi, ne m’aura pas laissé indifférent et qui démontre bien qu’encore aujourd’hui, en bien des pays, la femme n’est pas un homme comme les autres…
Points Positifs :
- Les cinq jeunes filles qui jouent le rôle des cinq sœurs, bien sur. Celles-ci éblouissent de belle manière ce film et sont très rapidement attachantes, particulièrement la plus jeune, Güneş Nezihe Şensoy.
- La thématique de Mustang prête à polémique mais bon, a un moment donné, pourquoi se voiler la face ?! Oui, la condition féminine en Turquie s’est considérablement dégradée au fil des ans et oui, il y a des mariages forcés, de nombreux crimes d’honneurs et, tandis que les hommes sont des rois, les femmes, elles, ne sont que des bonniches qui ne sont la que pour les satisfaire, particulièrement, bien entendu, loin des grandes villes. En parler n’est pas pointer du doigt une religion ou un pays mais, tout simplement, une injustice.
- Forcément, au vu de sa thématique, Mustang est un drame et certaines scènes sont plutôt dures. Cependant, surtout par le biais des jeunes actrices, il y a ici et la des scènes plus touchantes, drôles même parfois.
- La bande originale de Warren Ellis – oui, le compère d’un certain Nick Cave.
Points Négatifs :
- Certes, je ne nie pas que l’inceste n’existe pas – d’ailleurs, nul besoin d’aller jusqu’en Turquie pour cela, la France étant bien fournie de ce coté là – cependant, faire de l’oncle un violeur est, de mon point de vu, une erreur : ce dernier était déjà suffisamment haïssable au vu de son comportement vis-à-vis de ses nièces – poids des coutumes, de la religion, de la morale, de la société patriarcale – sans que l’on en fasse un violeur, histoire de noircir davantage le personnage.
- Grosse erreur a un moment donné : Lale, fan de foot, est supportrice de Trabzonspor, ensuite, l’occasion est donné d’aller voir un match où joue… Fenerbahçe ; mouais, a ce moment là, je me suis dit que les deux équipes jouaient l’une contre l’autre ?! Puis, oh surprise, à la télévision, quand il y a un but, on a droit à une image de célébrations d’un joueur de… Galatasaray ! Je sais, c’est un détail mais bon, les détails, ça compte aussi.
Ma note : 7,5/10
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