Portugal
Portugal
«
J'avais une furieuse envie d'acheter du tabac. Après deux ans sans fumer une
seule clope... Le pire, c'est que je m'en foutais copieusement. En fait,
j'étais vraiment ravi d'avoir été invité par ce festival. Plus de vingt ans que
je n'étais pas venu. Mes premiers pas d'adulte dans ce pays. J'étais fasciné et
heureux. Un vrai crétin. Et je me demandais bien d'où venaient cette étrange
colère puis cette douce mélancolie qui m'étaient tombées dessus sans crier gare
en moins de 24 heures ». La vie est grise. Simon Muchat,
auteur de bandes dessinées, est en panne d'inspiration et son existence est en
perte de sens. Invité à passer quelques jours au Portugal, il retrouve par
hasard ce qu'il n'était pas venu chercher : les odeurs de l'enfance, le chant
des rires de vacances, la chaleur lumineuse d'une famille oubliée – peut-être
abandonnée. Quel est le mystère des Muchat ? Pourquoi Simon se sent-il de nulle
part ? Et pourquoi, sans rien comprendre de cette langue étrangère, vibre-t-il
à ses accents ? Des réponses et d'autres questions l'attendent au cours de ce
voyage régénérateur. Ancré dans son passé gommé, Simon pourra enfin retracer sa
propre trajectoire. Et la vie retrouver ses arcs-en-ciel.
Portugal
Scénario
: Pedrosa
Dessins
: Pedrosa
Couleurs : Pedrosa
Couverture : Pedrosa
Éditeur : Dupuis
Genre : Société
Pays
d’origine : France
Langue
d’origine : français, portugais
Date
de parution : 16 septembre 2011
Nombre
de pages : 264
Mon
avis : En septembre 2011, sortait chez nos
libraires un véritable pavé – 264 pages – signé d’un certain Pedrosa et qui
s’intitulait sobrement Portugal. Forcément, de par mes origines,
une telle œuvre ne pouvait qu’éveiller ma curiosité… mais au fait, si je
n’étais pas, comme son auteur, un portugais né en France, me serais-je
intéressé à cette BD ? Hum, en disant cela, l’on pourrait croire que
ce Portugal est réservé aux luso descendants, ce qui serait
bien réducteur pour Pedrosa, car, quelque part, cette histoire pourrait
parfaitement convenir à tous les déracinés, tous les enfants – depuis devenus
adultes – dont les parents venaient d’ailleurs, tous ces fils et filles
d’immigrés, qui ont pu, a un moment ou un autre de leur existence, ressentir
cette curieuse et si désagréable impression de ne finalement, n’être jamais chez
soit nulle part : portugais en France, français au Portugal, c’est bien
évidement mon histoire comme celle de tant d’autres... Mais l’on peut également
apprécier à sa juste valeur ce Portugal tout en étant un
véritable français de souche depuis x générations : il suffit pour cela de
s’intéresser au monde qui nous entoure, de vouloir comprendre ce que peuvent
ressentir ces enfants de l’immigration, voir même, tout simplement, de vouloir
se satisfaire de découvrir une excellente bande dessinée, plus intimiste et
réfléchie que ce que la production de masse nous propose en temps normal.
Certes, contrairement à Pedrosa – l’auteur de ce Portugal pour
ceux qui ne suivent pas – mes parents étaient à cent pour cent portugais, de
même, je maitrise parfaitement la langue et mon rapport au pays de mes ancêtres
et bien plus fort et n’a jamais été entièrement coupé, ne serais ce qu’en
raison du football – comme quoi, ça peut aider parfois. Mais malgré nos
différences, combien de fois, en lisant le récit, je ne me suis reconnu dans
certaines situations vécues ou ressenties par le narrateur : que ce soit cet
accent tellement particulier, ce sentiment, comme il est dit vis-à-vis de la
famille, d’amour et de honte, mais aussi – le hasard faisant décidément bien
les choses – le fait que, comme dans la mienne, dans la famille du narrateur,
on ne se parle pas, du moins, pas des choses qui comptent vraiment… De même,
cette quête d’identité, ces questions vis-à-vis de nos origines, je me les suis
posés également. Et ce personnage – Pedrosa – tellement paumé et qui ne sait
pas ce qu’il veut, comment, là aussi, ne pas me reconnaitre un peu dans ce
qu’il est ?! Personnellement, en lisant ce Portugal, je me suis dit
que probablement que moi aussi, je devrais aller voir un psy, que mon rapport
au pays, celui a la famille mériterait d’être analyser un de ces jours, mais
bon, nous sommes ici pour parler d’une bande dessinée, pas de ce qui se passe
dans ma tête… non ? Mais au fait, cette BD, que vaut-elle véritablement ? Et
ben, en toute franchise, je dois reconnaitre que je me suis trop identifié au
personnage principal pour être parfaitement objectif et que, du coup, je ne
saurais pas trop quoi dire. Certes, la qualité est présente, certes, tant d’un
point de vu narratif que pour ce qui est des dessins, le style plaira a ceux
qui aiment réfléchir, qui aiment prendre leur temps, et surtout, qui n’ont pas
peur du particularisme des planches, de ce style le plus souvent esquissé, de
ces tons de couleurs qui varient suivant les pages, les situations et qui ne
plairont pas forcement a tout le monde. De même, l’utilisation quasi permanente
en fond sonore de la langue portugaise en déroutera plus d’un et si pour moi,
ce ne fut jamais un problème, je serais curieux d’avoir l’avis d’un lecteur ne maitrisant
pas la langue de Camoes sur ce point. Ce qui me fait me dire, une fois de plus,
qu’il vaut probablement mieux être d’origine portugaise pour apprécier à juste
titre cette œuvre ?! Quoi qu’il en soit, si vous aimez les récits intimistes,
si vous aimez ce qui sort des sentiers battus, tant d’un point de vu de
l’originalité du synopsis que pour ce qui est du style graphique, si vous êtes
de ceux qui pensent que la BD, ce n’est pas seulement que de l’esbroufe, alors,
ce Portugal vous conviendra peut être. Si vous êtes d’origine
étrangère, si depuis toujours, vous vous sentez entre deux mondes, alors,
ce Portugal vous conviendra probablement. Mais si, surtout,
vous êtes d’origine portugaise, alors, à coup sûr (sauf si vous n’aimez pas ce
genre), Portugal sera indéniablement fait pour vous et cette
œuvre vous prendra à la gorge, vous entrainant dans un tourbillon de souvenirs
qui remonteront a la surface, sans crier gare.
Points
Positifs :
-
Si, bien évidement, ce Portugal parlera
davantage aux luso-descendants, il est clair que, pris dans un sens plus large,
cette œuvre touchera tous les enfants d’immigrés, toutes celles et tous ceux
qui sont nés dans un pays qui n’était pas celui de ses parents et qui, quelque
part, n’ont pas toujours été acceptés, que cela soit dans leur pays de
naissance ou dans celui d’origine. Bref, une BD plus universaliste que prévu.
-
Cependant, bien évidement, si vous êtes d’origines portugaise, cette œuvre est,
indéniablement, faite pour vous et j’irais même plus loin, elle est presque
indispensable tant Pedrosa maitrise à merveille son sujet et nous livre des
séquences qui rappelleront bien des souvenirs à tous les luso-descendants…
-
Graphiquement, le style de Pedrosa est spécial et sort des sentiers battus,
certes, cependant, ce n’est pas plus mal et il faut reconnaitre que ce Portugal est magnifique, visuellement
parlant, surtout pour ce qui est du choix des couleurs.
Points
Négatifs :
-
Bien entendu, il faut apprécier ce genre de bandes dessinées nettement plus
cérébrales que la moyenne et qui ne sont pas vraiment faite pour le grand
public. On peut trouver cela dommage, c’est un fait, justement, que trop de
lecteurs préfèrent l’esbroufe à la réflexion.
-
Je pense ne pas me tromper en affirmant que si l’on n’est pas d’origine
portugaise ou, a la rigueur, étrangère, on risque de ne pas saisir totalement
ce que peut être une œuvre comme Portugal…
Ma
note : 8/10
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire